CRITIQUE CINEMA - THE TRIBE

 
"The Tribe" raconte l'histoire de Sergey, un jeune adolescent sourd et muet qui arrive dans un internat spécialisé où la violence, les brimades, le racket et la prostitution gangrènent chaque strates du système. Après avoir gagné la confiance de ses camarades, Sergey tombe malgré lui amoureux de la jeune Anna, qui rêve de quitter l'Ukraine pour la belle Europe et l'Italie. La chute est inévitable. La réalité cruelle et sans espoir.

Le premier long métrage du réalisateur Ukrainien est audacieux. Dès le départ, la donne est claire et radicale : le film est en langage des signes, sans sous-titres, sans commentaires. 

A vous de restez dans votre siège et de vous préparer pour l'expérience cinéma muet 2.0 ou de quitter la salle expressément sans demander à être remboursé. Après tout, vous n'aviez qu'à avoir un peu de courage.

Le système mis en place et la radicalité de la mise en scène fonctionnent du début à la fin. On réapprend sagement à regarder un film autrement, à ne plus s'attacher uniquement au texte mais au corps qui s'expriment, qui libèrent des émotions, aux détails qui traversent les images, aux décors, aux mouvements, aux couleurs. Au "silence" qui donne à voir différemment.

Le film repose sur un système de plans séquences qui se succèdent et se nourrissent les uns des autres. Pourtant, par moment, cela gagnerait à être resserré car même si le procédé fonctionne, la durée des plans est souvent un peu trop longue, frôlant la complaisance ou le manque de recul lors de la mise en place du dispositif. Le mixage du film manque de dynamique, d'explosivité... C'est sous mixé et c'est dommage. Puisque la parole est gommée, au moins dynamiter le reste pour faire ressortir le toucher, les contacts, les souffles, les respirations, tout ce qui est de l'ordre du sensible et du sensitif. Il est évident que les comédiens sont non professionnels et cela ne pose en aucun cas problème. Au contraire, la fraîcheur de ces gamins est revigorante. Entre documentaire et fiction. Le réel est là, sous nos yeux et pourtant tout est faux.

Dans un contexte politique tendu, "The Tribe" dresse le portrait d'un pays divisé, corrompu, violent où les espoirs de jours meilleurs sont écrasés sous le poids d'une réalité et d'un fatalisme déconcertant. Ce drame est sans concession. Âpre, noir, violent et crasseux dans on esthétique, la seule beauté vient de la naïveté de ses héros et de leurs rêves simples et pourtant inaccessibles.

Le film a remporté le grand prix de la Semaine de la Critique à Cannes... C'est une belle victoire pour une initiative qui ne manque pas de courage. "The Tribe" ne plaira pas à tout le monde et en déconcertera même certains mais il a le mérite de proposer quelque chose dans une époque où le cinéma est de plus en plus aseptisé. ll faut croire que dans les pays les plus politiquement sensibles on tente ce qu'en France on ne pourrait jamais produire.

Guillaume Foirest


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